Nous sommes. Pourtant.

 

Et elle, cette sensation.

Et mon cœur, qui s’en joue sans jamais s’en débattre.

Ce souffle, flûte apaisante.

 

Alors, comme Amour, tu me ronges m’endors et me hantes ?

 

Pauvre hère !

Dans ce merdier obscur, dans les étroites et sombres ruelles qui parsèment le Bronx : mon corps : dans ce fouillis de galeries qui déjà suintent la pourriture, tu te glisses ?

Est-il chose que tu n’épargnes pas ?

 

Je sens comme tu es.

Cet état de constance, de présence écrasante te situe sous nos yeux enfumés, affamés, éclairés aux vibrations de néons comme l’exhalaison blanche et froide qui enveloppe le mort.

 

Le filet que tu tisses et tends, que j’aspire, me plonge et me retient.

Prisonnier.

Malgré moi quand ne Le fus-je pas ?

 

Je vois  que le temps depuis peu te semble long. N’aie crainte : tes couleurs seules dessinent le bout du monde.

L’horizon ne me quitte plus

L’oraison m’assomme : « J’aime, j’aimais, j’aimerai »

 

Chaque chose est à ta  guise mais ton corps une Lame, qui tranche.

 « J’aime, j’aimais, je n’aimerai plus »

 

Tes émirs, feuilles d’automne, une fois, une seule, m’ont touché par le charme ; traîtres esclaves de ta grandeur…

 

On les nomme ici SIDA, là-bas AIDS ; toi, dans ton infinie conscience, as-tu songé comme j’en rêve à Leur donner un nom ?

 

Dans mon délire, je tempête : « Sang raisons ! »

Eh ! … la folie n’est-elle pas le privilège des grands princes ?

Tu es une reine, une impératrice

 

MORT, SIDA, VIE

 

SCHMAKé